Au cours de l’année 2021, ACAT-BURUNDI a constaté que les violations des droits humains se sont poursuivies en toute impunité suite aux conséquences socio-politiques et économiques de la crise politique qui a débuté en 2015 au Burundi. Le changement des dirigeants à la tête du pays au cours des élections de 2020 n’a pas apporté de changements significatifs dans la vie du pays.
Durant la période couverte par le présent rapport annuel, certaines avancées observées sont à saluer comme la libération de la prison des défenseurs des droits de l’homme, Nestor Nibitanga et Germain Rukuki. Nestor a été libéré le 27 avril 2021 suite à une mesure de la grâce présidentielle, tandis que Germain a été libéré le 30 juin 2021 après son jugement en appel.
Puis, la mesure d’interdiction des activités de l’association PARCEM, prise en juin 2019, a été levée le 2 avril 2021 tandis que les médias Bonesha FM et BBC Fm ont de nouveau fonctionné. Pour la radio Bonesha, qui a été détruite en mai 2015, la rediffusion des émissions a repris en date du 26 février 2021 tandis que pour la radio BBC Fm, interdite en mars 2019, les émissions ont repris le 16 juin 2021.
ACAT-BURUNDI apprécie également les avancées du ministère de la Justice par rapport à la mauvaise pratique de maintenir en détention les prisonniers acquittés ou qui ont purgé les peines. Puis, il y a eu libération des prisonniers dont certains prisonniers politiques dans l’objectif de désengorger les établissements pénitentiaires et de rétablir les prisonniers incarcérés injustement dans leurs droits.
Néanmoins, ACAT-BURUNDI reste préoccupée par de nombreuses entraves à l’exercice des libertés publiques. Dans son dernier rapport, la commission d’enquête des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans son dernier rapport de septembre 2021 « déplore que depuis l ‘arrivée au pouvoir du Président Ndayishimiye, l’espace démocratique reste fermé et la tolérance pour des avis critiques demeure limité même si la dynamique des relations entre le Burundi et la communauté internationale a changé. Malgré certains gestes symboliques isolés dans le domaine des droits de l’homme, aucune réforme structurelle n’a été engagée pour améliorer durablement la situation. L’état de droit poursuit son érosion progressive et les facteurs de risque de détérioration de la situation des droits de l’homme, qui ont certes évolué, demeurent globalement présents. »
L’impunité demeure toujours une menace pour la sécurité et la liberté des populations. En effet, les principaux auteurs présumés des violations des droits humains, identifiés parmi les agents des forces de l’ordre, du Service national de renseignement (SNR) et des membres de la milice Imbonerakure de même que certains administratifs ne sont jamais poursuivis.
Par rapport à cette récurrence de la dégradation des violations des droits humains, ACAT-BURUNDI déplore des discours de bonne intention des autorités, en l’occurrence du Chef de l’État ,mais qui sont rarement traduits en actes. Manifestement, le chemin à parcourir reste long pour le respect des droits humains en général notamment l’administration de la Justice et l’amélioration des conditions carcérales.
A titre illustratif, de janvier à décembre 2021, ACAT-BURUNDI a recensé 371 cas d’assassinats, 251 cas de détentions arbitraires,54 cas de disparitions forcées ,37 cas de personnes torturées et 7 cas d’exécutions extrajudiciaires .
Les dysfonctionnements dans le domaine de la Justice perdurent malgré une certaine évolution par rapport à la période d’avant l’accession au pouvoir du Président Ndayishimiye Evariste.
Cela se remarque particulièrement par la persistance de la corruption, les interférences des autorités diverses et des membres du CNDD-FDD dans les affaires de la Justice, le non-respect des procédures et des délais légaux, la non-exécution des décisions de Justice, notamment celles de remise en liberté des prisonniers ainsi que l’inertie dans certaines procédures.
Des attentes répétitives aux droits à la sécurité et à la liberté des personnes sont toujours orchestrées à l’endroit des militants du parti le Congrès National pour la Liberté (CNL) ainsi qu’à des ex-membres des forces armées burundaises (Ex-FAB) constitués principalement par la minorité tutsi. Ils sont tous abusivement accusés de collaborer avec les groupes armés qui attaquent le Burundi.
Des attaques armées par des groupes non identifiés et d’autres revendiqués par le Red Tabara ont occasionné une augmentation récente des disparitions forcées, de la torture ainsi que des arrestations et emprisonnements arbitraires.
Au sein des prisons, des actes de torture et de mauvais traitements sont toujours infligés aux membres du CNL, du MSD, des ex-militaires ou policiers des Forces Armées Burundaises, des personnes ayant manifesté contre le troisième mandat en 2015 et autres prisonniers d’opinion surtout dans la prison de Mpimba et Gitega. ACAT-BURUNDI constate qu’il y a encore des dossiers judiciaires de ces catégories de prisonniers évoqués ci-haut qui n’évoluent pas conformément à la loi.
Sur le terrain, ACAT-BURUNDI constate que les statistiques de la population carcérale n’évoluent pas toujours favorablement et dégagent même un taux d’occupation considérablement élevé, atteignant même 800 % de la capacité d’accueil des établissements pénitentiaires comme la prison de Muramvya.
L’incendie meurtrier survenu dans la prison de Gitega en date du 7 décembre 2021 a causé d’importants dégâts matériels et humains qui ont accentué les mauvaises conditions de détention qui étaient déjà précaires suite à la surpopulation carcérale élevée. La prison de Gitega est confrontée aussi à d’autres défis que connaît le milieu carcéral burundais, ce qui complique davantage la vie des prisonniers dans cette prison.
Le présent rapport est un condensé des rapports mensuels produits de janvier à décembre 2021 et concerne les établissements pénitentiaires de GITEGA, MURAMVYA, BUJUMBURA, BUBANZA,NGOZI , RUTANA, RUYIGI, MUYINGA et RUMONGE.
Il se focalise principalement sur les conditions carcérales en tenant compte des droits garantis aux personnes privées de liberté et la surpopulation carcérale ; l’administration de ces établissements pénitentiaires ainsi que les irrégularités ou les dysfonctionnements constatés dans les dossiers judiciaires des personnes privées de liberté seront abordées.
Ce rapport aborde également l ‘action de saisine des mécanismes internationaux des droits de l’homme onusiens et africains pour les victimes des violations des droits humains se trouvant principalement dans les prisons de la zone de couverture des activités de l’ACAT-BURUNDI.
Enfin, le présent rapport revient sur la gestion de la pandémie COVID 19 en général dans le milieu carcéral burundais.
Des recommandations sont formulées à l’endroit des différents acteurs clés dans l’administration pénitentiaire et l’accès à la justice au Burundi.
Veuillez trouver en bas l’intégralité du rapport :
Rapport sur les prisons de l’ACAT BURUNDI , édition 2021